En 2020, le salaire minimum tout compris franchira la barre du 15$ pour la première fois
En ce début d’année et de décennie, à quoi peut-on s’attendre sur le plan de l’environnement d’affaires des dépanneurs au Québec?
Se dirige-t-on vers une amélioration ou encore, une dégradation? Doit-on craindre le pire ou au contraire, se mettre à rêver à une réelle embellie?
Si l’on se fie aux grands indicateurs, on voit fort heureusement plusieurs signaux encourageants pour ceux et celles qui sont actuellement capables de garder la tête hors de l’eau dans un marché aussi exigeant que celui du commerce de proximité.
En revanche, la hausse effrénée du salaire minimum vient faire très mal à une industrie dont les magasins sont ouverts de 7h à 23h. En effet, la dernière hausse décrétée le portera à 13,10$ de l’heure à compter du 1er mai prochain, ce qui totalise 15,14$ une fois les avantages sociaux pris en compte. C’est donc dire que le coût du salaire minimum pour les employeurs franchira pour la première fois cette année la barre psychologique des 15$ de l’heure.
Or, le gouvernement ne comprend pas qu’en agissant ainsi, ce sont les plus petits, les plus indépendants et les plus fragiles qui écopent et qui tombent au profit des plus gros et des plus forts, avec pour résultat une perte de diversité et de nombre de surfaces qui affecte l’ensemble des consommateurs de même que la collectivité.
Cela étant dit, voici un tour d’horizon de ce que 2020 réserve aux dépanneurs sur le plan des perspectives d’affaires. Il y a du bon… et du moins bon!
Le Québec en feu… économiquement
Commençons par les bonnes nouvelles. Cela faisait longtemps qu’on avait vu ça, mais le Québec vient de finir l’année 2019 sur les chapeaux de roue économiques, devançant même l’Ontario, l’Alberta et l’ensemble du Canada au chapitre de la croissance, des emplois et même, de l’inflation!
À preuve : le PIB du Québec a affiché une croissance de 2,8% de janvier à mai, soit un taux deux fois plus élevé que le 1,4% observé au Canada pour la même période (source : Les Affaires).
Voici quelques statistiques significatives qui ne laissent aucun doute sur le dynamisme actuel de l’économie québécoise.
Pour les dépanneurs, la surprenante vitalité de l’économie québécoise est un apport d’oxygène pur. Cela signifie que dans l’ensemble du Québec, on voit davantage de consommateurs plus riches et plus occupés, donc qui ont plus d’argent à dépenser et moins de temps pour le faire. Exactement le profil idéal pour un dépanneur qui demeure, comme on le sait, un vendeur de temps et de commodité.
L’inflation se montre le bout du nez
Le revers de la médaille de cet élan économique est une plus forte inflation qu’on voit poindre au Québec pour la première fois depuis 2011. Aux dernières nouvelles, on se dirige vers un taux d’inflation de 2,2 % pour 2019, un taux qui devrait se maintenir en 2020 selon les prévisions de Québec.
Or, qui dit inflation dit aussi hausse des permis qui sont ajustés chaque année par Québec en fonction, le plus souvent, du taux d’inflation canadien et non québécois, taux canadien qui est en général plus élevé.
De plus, au cours des 10 dernières années, Québec a ajouté de nouvelles réglementations très coûteuses notamment concernant l’essence et l’exploitation des guichets automatiques. Ces deux facteurs ont fait en sorte que le coût global des permis pour un dépanneur avec essence a presque doublé en 10 ans!
Un salaire minimum qui coûte un maximum
Pour les dépanneurs toutefois, c’est vraiment la hausse effrénée du salaire minimum qui fait le plus mal. Bien que le gouvernement ait en général limité la hausse des avantages sociaux (en particulier la cotisation au Fonds de service en santé qui a baissé de 40% en 10 ans), le salaire minimum augmente beaucoup trop vite, soit presque trois fois plus vite que l’inflation. Et c’est la dépense la plus onéreuse d’un dépanneur ouvert 6000 heures sur les 8760 heures que comptent une année.
De nouvelles réglementations à prévoir
Au chapitre de la réglementation, les perspectives sont moins réjouissantes. La nouvelle politique de consigne dont on annoncera les grands pans cette année prévoit faire gonfler le coût des bouteilles d’eau de 10 cents l’unité. Bien que remboursable en partie, cette consigne fera sans aucun doute chuter les ventes de manière significative. Idem pour tous les nouveaux contenants touchés par cette consigne comme les bouteilles de vin, quoique dans une moindre mesure. Reste à voir si le gouvernement Legault ajustera à la hausse la prime du détaillant qui est resté plafonnée à deux cents depuis 1984.
Par ailleurs, les 400 nouveaux centres de dépôts de contenants en vitre que le gouvernement prévoit ouvrir un peu partout dans les centres commerciaux risquent d’éloigner la clientèle des commerces de proximité. On ne prévoit toutefois pas déployer cette infrastructure avant 2022 mais des projets pilotes seront mis sur pied dans certaines régions qui pourront alors être affectées.
Côté tabac, il faut s’attendre à ce que les ventes continuent de baisser à un rythme très lent de l’ordre de 2% par année, si l’on se fie aux dernières années. Les autorités gouvernementales, qui considèrent les dépanneurs comme étant « une nuisance de santé publique », vont par ailleurs poursuivre leur effort de lobbying occulte notamment pour faire adopter des réglements prohibitionnistes et idéologiques tels que la surtaxe sur les boissons gazeuses ou encore, la limitation de l’offre des dépanneurs aux abords des écoles.
Quant à la loterie, Loto-Québec continuera vraisemblablement de couper dans ses coûts indirects aux détaillants et il faut s’attendre à ce que les ventes en ligne poursuivent leur montée inexorable.
Il reste toujours le fameux plan de déréglementation de l’industrie du détail déposé peu avant l’élection du gouvernement Legault et qui comprenait tellement de belles promesses qu’on avait de la misère à y croire (voir ici). Pour le moment, on ne voit rien poindre de ce côté.
Un rayon de soleil: la promesse de Justin
En terminant, l’une des belles surprises de la dernière campagne électorale fédérale est, rappelons-le, la promesse de Justin Trudeau à l’effet d’abolir les frais de carte de crédit sur les taxes. Cette mesure aurait pour effet d’éliminer d’un trait environ 15% des frais de cartes, mesure qui aura un impact en particulier chez les dépanneurs qui vendent de l’essence.
Il reste à voir toutefois si M. Trudeau livrera ce qu’il a promis, surtout depuis que sa députée Linda Lapointe ne fait plus partie de la députation, ayant perdu les dernières élections au profit d’un candidat du Bloc québécois.
Un autre combat par ailleurs sera celui de modifier la loi sur la protection du consommateur afin que les détaillants puisse apposer des frais de carte de crédit s’ils le souhaitent, une possibilité qui devrait normalement devenir réalité peut-être même cette année dans la foulée d’une entente entre VISA, MasterCard et les représentants des détaillants canadiens ayant procédé à un recours collectif il y a de cela plusieurs années (voir article ici).
C’est donc sur le plan de l’amélioration de l’économie ainsi que de la réduction des frais de carte de crédit que l’on voit le plus de potentiel d’amélioration pour ce qui est de l’environnement d’affaires des dépanneurs.
Quant au reste, ça continue de s’empirer avec un gouvernement de tendance paternaliste (interdiction de vente du cannabis aux moins de 21 ans) qui juge l’industrie des dépanneurs peu prioritaire, voire même nuisible à la santé de la population.