Le port obligatoire du masque ne semble pas avoir encouragé les vols en magasin… pour le moment!
Cette scène s’est produite il y a quelques semaines dans un dépanneur en région (voir photo du haut).
La femme masquée entre dans le dépanneur. Elle pointe son regard vers un écran de télévision qui la montre en direct. Elle en profite pour se fixer quelques secondes, le temps de vérifier que son masque couvre bien son visage. Elle se dirige ensuite à la caisse et demande une cartouche de cigarette. Une fois sur le comptoir, elle s’en saisit et sort à toute vitesse du magasin, sans payer. Un vol de plus de 100$.
Étant masquée, la cliente n’est pas identifiable. La question se pose donc: le port obligatoire du masque a-t-il encouragé ce crime?
En apparence, c’est le cas puisqu’on imagine mal une personne agir ainsi sans masque. Mais alors, cet événement est-il l’exception ou la règle?
Vérifications faites, il semble bien que ce soit l’exception plutôt que la règle… ou du moins, pour le moment!
Pas de hausse de vols selon la SQ
Après plusieurs recherches et appels, nous avons appris que l’imposition du masque ne s’est pas accompagné à date d’une hausse significative du nombre de vols en magasin.
Pour ce qui est des propriétaires et gestionnaires de bannières, tous ceux interrogés par DepQuébec aux fins de cet article ont été unanimes: les vols n’ont pas augmenté à leur connaissance depuis que les clients sont obligés de revêtir un masque.
« Le fait qu’on surveille les clients par caméra, même s’ils ont des masques, nous permettent d’intervenir quand ils sont en magasin avec un article caché sur eux. Mais ça n’arrive pas si souvent! », de nous indiquer un propriétaire qui a requis l’anonymat.
Par ailleurs, le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD), qui suit de près cet enjeu, abonde dans le même sens en indiquant « n’avoir reçu aucune information » spécifique à ce sujet de la part de ses membres.
Quant à la Sûreté du Québec, on nous confirme, après avoir consulté les plus récentes statistiques sur l’ensemble du territoire, qu’il n’y a pas eu de hausse marquée des vols à l’étalage ou des vols qualifiés (avec violence) sur le territoire québécois depuis le début de la pandémie.
Il demeure toutefois contre-intuitif de croire que le port généralisé du masque n’ait entraîné aucune conséquence au chapitre de la criminalité. Pas plus tard que cette semaine (voir photo suivante), une autre affaire est venue rappeler comment le port généralisé du masque a pu aider des criminels.
Des experts inquiets
Il est tout à fait légitime, en effet, de s’inquiéter du fait que le port généralisé du masque peut se traduire par un comportement plus déviant dans la société.
On se rappellera en effet qu’en mai 2012, la ville de Montréal a adopté un réglement interdisant le port du masque dans les manifestations à des fins de sécurité publique, un règlement qui sera abandonné quatre ans plus tard et qui aura donné lieu à une longue saga juridique.
Par ailleurs, dans un article publié au début de l’été, le Loss Prevention Magazine fait état de craintes à ce sujet (voir ici). Selon un expert britannique, le port du masque nuit bien entendu grandement à l’identification des personne:
« C’est particulièrement inquiétant parce que les masques vont à l’encontre des méthodes de sécurité traditionnelles pour valider l’identité des personnes, identifier les suspects ou identifier les personnes pour permettre l’entrée des bâtiments. » – Peter Power, consultant renommé et conférencier en gestion de crise
Un autre expert craint pour sa part l’incitation au crime qu’il pourrait entraîner.
« Les personnes qui portent des masques se sentent plus habilitées et sont plus en confiance de faire des choses qu’elles n’auraient normalement pas faites si leur visage avait été vu en public » — Bryanna Fox, ancienne agente du FBI et professeure de criminologie à l’Université de la Floride du Sud.
Les masques encouragent l’anonymat, ce qui, à son tour, donne aux porteurs l’immunité contre l’identification publique, note par ailleurs une étude qui a examiné le lien entre les masques et les comportements déviants. Celle-ci conclut «que l’usage généralisé des masques menace la sécurité et accroît les propensions à des actes antisociaux ayant des conséquences criminelles».
Le Québec plus sécure qu’ailleurs au Canada
Il demeure qu’en matière de vols dans les magasins, les statistiques indiquent que le Québec fait traditionnellement bonne figure à travers le Canada, comme le montrent les graphiques suivants:
Pour ce qui est des vols qualifiés (vols avec menace et violence), là aussi le Québec fait mieux qu’ailleurs au Canada, mais dans une moindre mesure.
Les propriétaires de dépanneur au Québec ont donc cette chance appréciable de pouvoir exploiter leur commerce dans un environnement relativement sécuritaire mais il est bien certain que le port obligatoire du masque, quoique nécessaire vu les circonstances, représente un facteur de risque additionnel à leurs opérations avec lequel ils doivent jongler… une préoccupation de plus qui s’ajoute au combat quotidien de survivre dans un environnement d’affaires impitoyable.
Dur dur d’être dépanneur!