Les ventes de tabac en baisse au Québec pour une deuxième année de suite

Le tabac est en baisse, mais en baisse ordonnée. Il n’y a pas de chute libre à l’horizon ou du moins, pas encore!

En effet, pour une deuxième année consécutive, les ventes légales de tabac sont en nette diminution au Québec.

À preuve, les plus récentes statistiques gouvernementales obtenues par DepQuébec, notamment les chiffres dévoilés la semaine dernière par le ministère des Finances dans la foulée de la mise à jour économique du nouveau ministre des Finances, Éric Girard.

Selon les Comptes publics 2017-2018 qui renferment les données comptables vérifiées des opérations financières du gouvernement québécois, les revenus réels de taxe sur le tabac au Québec ont diminué de 2,9% l’an dernier (de avril 2017 à mars 2018) par rapport à l’année précédente.

Et comme en 2016-2017, elles avaient aussi baissé de 3,5% (voir article ici), il s’agit donc de la deuxième année de baisse consécutive totalisant 6,4% de baisses de ventes depuis 2016.

Les revenus annuels de la TPT (taxe provinciale sur le tabac) ont baissé de 31M$ pour atteindre 1,014 milliard$ en 2017-2018, soit une diminution des recettes fiscales de 2,9% par rapport à l’année précédente, pour des prévisions de 1,023 milliards$ en début d’année. Depuis le sommet de 1,083 milliards$ en 2016, le marché a perdu 6,4% de volume de ventes (la TPT étant calculée sur le volume), une baisse en partie compensée par la hausse des prix des manufacturiers depuis deux ans.
Des indicateurs qui pointent tous vers le bas

Compte-tenu de l’ensemble des assauts subis par le tabac ces dernières années — prohibition du menthol, maintien de la contrebande, légalisation de la vente de produits de vapotage avec nicotine et autres — la baisse des ventes semble relativement contenue surtout quand on sait que 2016 a été une année record de ventes, si l’on se fie aux recettes fiscales qui ont atteint un sommet de 1,083 milliard de dollars.

Par ailleurs, d’autres statistiques provenant de diverses sources renforcent ce portrait d’une baisse soutenue mais ordonnée de la vente de tabac.

Ainsi, selon les statistiques de ventes (légales) de tabac publiées par Santé Canada, le sommet des ventes au Québec se serait produit non pas en 2016, mais bien en 2012, soit quatre années plus tôt, de sorte que le marché serait continuellement en baisse depuis 6 ans.

Selon Santé Canada, les ventes de cigarettes au Québec seraient passées de 7,9 milliards de bâtonnets de cigarette en 2012 à 6,6 en 2017, une baisse de 15,7% en cinq ans, une donnée plausible sachant que la taxe de vente ayant augmenté en 2012, 2013 et 2014, celle-ci aurait pu avoir pour effet d’obfusquer une baisse de volume.
Moins de fumeurs et qui fument de moins en moins

Un autre indice pointant vers un marché déclinant est la récente étude fédérale sur le tabagisme appelée ECTAD, soit l’Enquête canadienne sur le tabac, l’alcool et les drogues.

D’après ce sondage, le Québec comptait un taux de tabagisme de 15,7% en 2017 ce qui, pour une population sondée de 6,987,000 personnes, représente une cohorte de 1,097,000 fumeurs en tout.

Si l’on se fie aux différentes enquêtes de tabagisme dont les méthodologies sont différentes et la fiabilité moyenne, le Québec connaîtrait une baisse marquée du nombre de fumeurs depuis le début de la décennie de l’ordre de 30%, ce qui paraît plutôt élevé relativement aux recettes fiscales perçues qui n’ont cessé d’augmenter jusqu’en 2016 (note: avant 2017, la cohorte est de 15 ans et plus tandis qu’en 2017, elle est de 12 ans et plus).

Ces enquêtes, qui sont beaucoup moins fiables que les recettes fiscales ou encore, les statistiques de ventes, tendent à indiquer une baisse du nombre de fumeurs depuis quelques années en particulier, alors qu’entre 2005 et 2015, ce nombre a relativement peu bougé.

Toutefois, compte-tenu de la hausse de population d’une part, et aussi du fait que cette cohorte fume probablement de moins en moins, ces données viennent renforcer le portrait d’une baisse soutenue du marché.

Ce tableau vient déboulonner le vieux mythe des super-taxes élevées pour lutter contre le tabagisme. Les colonnes en bleu illustrent le prix moyen du tabac dans les diverses provinces (source: ici) et la ligne rouge, le taux de tabagisme selon la récente étude ECTAD. Or, la relation prétenduement immuable entre un prix élevé du tabac et une consommation faible n’est tout simplement pas avérée. Ainsi, le Québec et l’Ontario ont un taux de tabagisme beaucoup plus faible que l’Alberta, la Saskatchewan, Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse qui, pourtant, vendent du tabac nettement plus taxé et plus cher et ce, depuis de nombreuses années. Si cette relation était causale, une ligne rouge droite partirait du bas gauche pour se rendre en haut à droite. Ce n’est vraiment pas ce qu’on voit.
Un avenir sans tabac pour les dépanneurs?

Une catégorie de produits dont les gouvernements se sont tous jurés d’avoir la peau ne peut être considérée comme une catégorie d’avenir.

Avec l’emballage neutre qui sera implanté à l’automne prochain et la popularité grandissante du vapotage à nicotine, les perspectives du tabac s’amenuisent d’année en année.

Mais si le tabac vit certes sur du temps emprunté, il lui reste encore de très bonnes années que les dépanneurs se feront un devoir d’alimenter de manière légale et responsable.

Et comme l’an dernier, nous demeurons surpris de la résilience de ce marché plus que centenaire qui, envers et contre tout— attaques réglementaires, assauts compétitifs, mauvaise presse et autres — semble capable de faire mentir les pires pronostics bon an mal an et ce, en pliant certes, mais sans jamais s’effondrer… du moins jusqu’à maintenant.

Bien sûr, on ne sait pas quand ou même si cela se produira, mais un jour pourrait bien voir le marché s’effrondrer, avec des baisses annuelles atteignant deux chiffres de pourcentage.

Et d’une telle chute naîtra un profond mouvement de transformation du modèle d’affaires des dépanneurs qui en laissera de nombreux sur le tapis tandis que d’autres prendront leur envol parce qu’ils auront simplement prévu le coup.

Un commentaire sur "Les ventes de tabac en baisse au Québec pour une deuxième année de suite"

  • 23 décembre 2018 à 03:40
    Permalink

    Selon moi ce n’est même plus si la cigarette va disparaître un jour mais plutôt QUAND. Cependant je crois que ça ne sera pas d’ici la prochaine décennie “2030”. De toute manière si on un dépanneur ne fait que disons 4$ sur un paquet à 12$, ce n’est pas la perte de ces ventes qui devront tant les affecter.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *