EXCLUSIF: « Tweeter est une communication assujettie à la Loi » — Commissariat au lobbying
Véritable état dans l’état, la Santé publique au Québec est le bras politique du puissant ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Fort de ressources importantes, elle vise l’adoption de lois et règlements toujours plus restrictifs et prohibitifs.
Or, 30 ans après la création des Directions de Santé publique, son influence est écrasante et les lois, plus sèvères que jamais. Pourquoi?
Dans une série percutante intitulée «Le lobby occulte de la Santé publique» et qui résulte de plusieurs mois d’enquête ainsi que 200 demandes d’accès à l’information, DepQuébec révèle les dessous des pratiques douteuses et manipulatrices de lobbying occulte du gouvernement… par le gouvernement!
Aujourd’hui, le 5e volet porte sur des activités de lobbying présumées non déclarées par la CQCT au niveau fédéral.
Les allégations de violations graves et multiples à la loi fédérale du lobbying qui pèsent présentement sur la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac (CQCT) et qui sont passibles de fortes amendes et même de lourdes peines de prison advenant qu’elles se traduisent en condamnations (voir ici) prennent aujourd’hui encore plus d’élan et de poids avec la révélation de dizaines, voire presque 200 contacts directs d’influence initiés par l’organisme auprès d’élus et ministères fédéraux depuis les quatre dernières années, tout cela alors que la Coalition n’a produit aucune déclaration au registre fédéral de lobbying depuis bientôt neuf ans, déclarations qui sont pourtant requises par la loi et que tous les groupes antitabac sans exception ont remplies.
Ainsi, ce groupe façade du MSSS qui se consacre uniquement et exclusivement à faire du lobbying politique (voir l’étude Breton ici) pour le compte de fonctionnaires tapis dans l’ombre, créé à l’insu du ministre Jean Rochon (voir ici) et qui a déjà reçu 8,4 millions$ en subventions secrètes « non récurrentes » depuis 1996 (voir ici) a diffusé depuis son compte Twitter créé en 2015 pas moins de 122 tweets d’influence au fédéral qui ont visé des élus ou ministères à 173 reprises en transmettant une communication électronique individuelle et spécifique à chacun d’eux.
Or, ces messages de pression, d’attaque, d’intimidation, de harcèlement ou encore d’encouragement auprès de politiciens et ministères fédéraux selon leurs « bons » ou « mauvais » agissements depuis 2015 sont les premières preuves tangibles que nous obtenons de communications directes initiées par la Coalition auprès d’élus fédéraux depuis 2011, des contacts tous assujettis à loi fédérale sur le lobbying.
Et c’est nul autre que le Commissariat au lobbying du Canada qui nous a confirmé par écrit que les tweets aux élus sont des activités de lobbying en bonne et due forme au sens de la loi fédérale.
« Oui, Twitter et Facebook sont considérés par le Commissariat comme étant des formes de communication électronique assujetties à la Loi. » — Commissariat au lobbying du Canada, 10 décembre 2019
Nous pouvons ainsi d’ores et déjà ajouter au fardeau déjà extrêmement lourd des allégations de fausses déclarations en 2011 et précédemment (voir ici) ces toutes nouvelles allégations d’activités de lobbying conduites depuis les dernières années sans aucune déclaration à cet effet… et ce n’est qu’un début!
Car quand on parle de lobbying, attachez votre ceinture. Comme on peut le voir ci-bas, ce groupe façade du MSSS n’entend pas à rire et ne fait pas dans la dentelle… surtout qu’il n’a que ça à faire, du lobbying!
Hyperactif en lobbying mais zéro en déclarations
L’examen et le recensement des tweets de la Coalition depuis 2015 procure une perspective sidérante des stratégies d’action et de pressions politiques au fédéral mené par cet organisme se prétendant issu de la société civile mais téléguidé par l’apparatchik de la santé publique québécoise dont il sert de paravent (voir étude Breton, chapitre 8).
La période couverte comprend plusieurs phases très stratégiques dont l’adoption de la règlementation sur les paquets neutres par le gouvernement fédéral de 2015 à 2018 ainsi que tout ce qui a trait à la réglementation sur le vapotage que la Coalition — tout comme son commanditaire et unique payeur, le MSSS — trouvent beaucoup trop laxiste et pas assez alarmiste.
Or, il appert que même si le gouvernement Trudeau a promis d’emblée, dès son élection en 2015, de mettre en place l’emballage neutre sur les paquets de cigarettes, la Coalition n’a jamais pris cet engagement pour acquis en talonnant sans aucun répit les politiciens fédéraux sur le sujet, de crainte notamment qu’ils reculent « face au lobby du tabac » dont ils ne cessent de brandir la menace omniprésente et fédératrice tout comme l’ennemi fantomatique du roman 1984.
23 tweets hargneux en une journée!
Un relevé des 173 tweets individuels de la Coalition aux élus ou entités gouvernementales donne un aperçu éloquent des objectifs poursuivis.
Ainsi, 75% des tweets envoyés comprennent des messages négatifs:
- 65 envois visent à harceler un député en le pointant du doigt pour avoir rencontré les dépanneurs ou autre association jugée pro-tabac;
- 64 envois visent à exercer de la pression (principalement sur la ministre de la Santé ou Santé Canada) pour faire davantage ou se dépêcher d’agir en matière de réglementation.
Le restant des envois, soit 25%, sert à appuyer les alliés de la Coalition au fédéral comme par exemple, la sénatrice Chantale Petitclerc ou encore, la citer en exemple auprès des autorités pour leur mettre de la pression.
Les tweets de harcèlement forment le plus gros contingent des messages envoyés. Sous pression constante du MSSS dont le financement annuel de 450,000$ n’est jamais garanti et toujours « non récurrent », la Coalition en fait toujours plus que demandé en livrant une forme de lobbying toxique qui s’en prend directement aux groupes de la société civile qui n’ont pas l’heur d’épouser ses positions, notamment l’Association canadienne des dépanneurs en alimentation et ses filiales provinciales.
Nous reviendrons dans un article subséquent sur les prétentions à l’effet que l’ACDA est un groupe façade du tabac, mais pour le moment, contentons-nous de souligner les moyens excessifs employés par les agents secrets du MSSS.
Ainsi, dans la foulée de rencontres tenus par l’ACDA à Ottawa, la Coalition a transmis à chaque député rencontré par les dépanneurs un tweet hargneux et intimidant pour les couvrir d’opprobe.
Or, le problème n’est pas tant qu’il s’agit de tweets hargneux (tous étant libres d’exprimer leurs opinions), mais bien que ces initiatives découlent de politiques du MSSS, sont financées par des fonds publics et avalisées par des fonctionnaires québécois tapis dans l’ombre qui tirent les ficelles de cette comédie burlesque dans le plus grand secret, chose qu’on ne voit nulle part ailleurs au Canada ni même dans le monde.
Pas une, mais bien quatre conférences de presse à Ottawa!
Le fait que la Coalition n’ait rien déclaré au registre des lobbyistes fédéral depuis le 2 février 2011 est d’autant plus saisissant que l’on constate, par le biais de ses propres tweets, qu’elle a mené, orchestré ou participé à pas moins de quatre conférences de presse à Ottawa pour exiger du gouvernement fédéral des amendements, restrictions, dépôts de projet de loi ou autres demandes du même acabit toutes visées à grands traits par la loi fédérale sur le lobbying.
Les apparitions médiatiques de la Coalition antitabac se font la plupart du temps avec d’autres groupes antitabac comme la Société canadienne du cancer ou Action for Smoking & Health de l’Alberta. Toutefois, tous ces organismes ont inscrit au registre leurs activités, sauf la Coalition qui n’a rien inscrit depuis 2011 et qui est le seul organisme antitabac, par ailleurs, à avoir été créé par un gouvernement provincial!
D’ailleurs, qui a trouvé le nom même de cette Coalition? Un fonctionnaire, bien entendu!… voir à ce sujet la thèse Breton, page 149.
Il sera intéressant de voir la perspective du Commissariat face à ce déluge d’infractions alléguées qui ne fait que commencer puisque l’enquête de DepQuébec n’en est qu’à ses débuts. En effet, grâce à la loi d’accès à l’information, toute la correspondance de la Coalition avec les ministères fédéraux clés est en train d’être examinée, scrutée, analysée, revue et ce, incluant le moindre courriel aux ministères concernés.
Il reste à espérer que justice soit faite et que les responsables subissent des peines exemplaires en cas de condamnation, mais pour l’heure, on peut d’ores et déjà affirmer que sur le plan du jugement de la part de la Coalition, on repassera!
Et c’est sans doute aussi l’occasion où jamais pour le fédéral de régler ce « problème ». Souhaitons-le vivement car nul n’est au-dessus des lois et surtout pas ceux qui, subventionnés jusqu’aux oreilles en cachette, se drapent de vertu en prétendant posséder la vérité infuse.
Pour obtenir copie du dossier complet et à jour transmis au Commissariat, faites la demande en cliquant ICI.